La 15ème édition du festival international du film d’éducation, a été ouverte, avant-hier mardi 3 décembre, avec la projection d’un long-métrage québécois, « Jeune Juliette » qui évoque l’entrée dans l’adolescence d’une jeune fille de 14 ans, « effrontée, malicieuse, un peu grosse et menteuse », il sera clôturé samedi avec la projection d’un long métrage français, « Un vrai bonhomme », l’histoire d’un adolescent « timide et sensible » dont le grand frère s’emploie à faire « un mec, un vrai ». Parmi les autres temps forts, à noter ce jeudi 5 décembre une table-ronde qui réunit Philippe Meirieu, pédagogue et Pierre Delion, pédopsychiatre, autour de la Convention des droits de l’enfant. Celui-ci peut-il arguer de ses droits « pour refuser certains enseignements à l’école » ? Comment comprendre le devoir de l’éduquer qui s’impose à l’adulte ?
Christian Gautellier, directeur du festival, directeur national des CEMEA, répond aux questions de ToutEduc.
ToutEduc : Le mouvement de grève a-t-il un impact sur le festival ?
Christian Gautellier : Il en complique l’organisation. Certains réalisateurs qui devaient venir présenter leurs films ne pourront pas être présents. Nous avons aussi des jeunes venus d’outre-mer, de Polynésie française et de la Réunion notamment, qui ont des avions à prendre dimanche, et dont nous devrons organiser le retour… Mais une bonne partie de notre public est normand, les enseignants qui font grève et leurs élèves auront davantage de temps pour venir au cinéma (sourire) ! A condition que les salles ne soient pas déjà pleines. Le jour de l’ouverture, nous avons fait au total plus de 1 000 entrées…
ToutEduc : Quelles sont les nouveautés cette année ?
Christian Gautellier : Nous continuons d’élargir notre champ d’action. La semaine dernière, par exemple, nous avons programmé un « ciné concert » pour les petits, avec 5 courts métrages d’animation et 3 musiciens. Nous avons également organisé un échange entre des EHPAD et des écoles ou centres de loisirs. Les enfants et les jeunes ont choisi des films pour les personnes âgées et réciproquement. Nous initions également un mouvement en direction des aveugles et nous travaillons sur l’audio-description. Nous avons mis en place deux séances dans un hôpital psychiatrique. Nous allons à la rencontre des publics empêchés.
ToutEduc : Et du point de vue de la programmation ?
Christian Gautellier : Nous nous intéressons aux nouvelles écritures cinématographiques. Nous présentons aujourd’hui « Les Falaises de V. » qui propose une fiction en réalité virtuelle, avec casques. Sont également programmés les quatre épisodes du « Journal d’un maître d’école », un film de Vittorio De Seta qui date de 1973 et qui a été tourné dans une école de la banlieue de Rome, avec les élèves – pour la plupart fils de familles immigrées – dans leur propre rôle. Il a été diffusé à la télévision italienne et il a suscité un débat sur l’école à l’échelle nationale, mais n’a jamais été projeté en France, hormis dans quelques festivals. C’est une vraie pépite, également diffusée en DVD avec un livre. Et nous continuons de nous ouvrir aux cultures étrangères, nous avons rapporté de Russie deux films magnifiques que nous avons ajoutés au programme au dernier moment.
ToutEduc : Vous étiez en Russie ?
Christian Gautellier : Oui, à Tchéliabinsk dans l’Oural, qui a organisé début novembre son festival du film d’éducation dans le cadre du partenariat que nous avons noué là-bas (voir ToutEduc ici). Sur quelques jours, comme à Evreux, il a accueilli 5 000 enfants, lycéens, étudiants et adultes qui ont pu voir une quarantaine de films d’éducation, dont 18 issus de la programmation du festival d’Evreux.
ToutEduc : Vous avez d’autres projets à l’international ?
Christian Gautellier : Oui, nous voulons travailler avec la Ville de Barcelone et avec le Québec, comme nous travaillons déjà avec le Brésil.
ToutEduc : Et en régions ?
Christian Gautellier : Comme vous le savez, les films sont ensuite disponibles pour une trentaine de déclinaisons locales du festival, c’est notamment le cas en Occitanie avec une quinzaine de sites. Notre partenariat avec Canopé doit aussi permettre une montée en puissance en Auvergne – Rhône – Alpes.
ToutEduc : Comment résumeriez-vous la philosophie du festival ?
Christian Gautellier : Voir des films qui présentent des moments d’éducation, de passage à l’âge adulte, aide les jeunes à grandir, à réfléchir à des enjeux de société. Et voir des films qui viennent d’ailleurs, ou dont la forme n’est pas celle des produits de consommation courants, permet de faire un pas de côté. Ca fait changer. Et le festival attire un nouveau public au cinéma, comme les CEMEA le font au festival d’Avignon pour le théâtre