Edito de la lettre de Tout Educ, rédigée par Pascal Bouchard

La lettre du 8 décembre 2021.

“Editorial : L’enseignant : “C’est vrai, cet élève est mon chouchou, mais on ne peut pas vivre ce métier sans affects.” La mère : “Vous lui avez mis des idées dans la tête, et maintenant, vous le laissez tomber…” Ces éléments de dialogues de “Petite nature” donnent une idée des enjeux de ce long métrage de fiction, qui a été primé au “Festival international du film d’éducation”. Un enfant d’une dizaine d’années, scolarisé en CM2 à Forbach, d’une troublante beauté, veut plaire à son maître, d’abord comme tous les enfants (ou presque) qui ont envie d’être distingués par l’adulte, puis, après avoir rencontré la compagne de l’enseignant, il rêve d’une autre famille que la sienne, passablement déglinguée, vraisemblablement d’origine manouche sédentarisée et déclassée, puis … on ne sait plus trop, ni lui non plus, ni l’enseignant, ni sa compagne, ni la mère.

Le film sera sur les écrans le 9 mars, et, avec tous les autres films projetés la semaine dernière à Evreux, il est l’occasion de s’interroger sur le sens de l’expression “film d’éducation”. Jean-Paul Cayeux, lui-même cinéaste, a imaginé ce festival dans les années 2000 alors qu’il était directeur du CDDP de l’Eure (le centre départemental de documentation pédagogique, on ne parlait pas encore de Réseau Canopé) et le mot “éducation” s’est sans-doute imposé pour justifier sa création. Si on en juge par la sélection de cette année, ce sont des films qui parlent d’éducation ou qui amènent à se poser des questions sur l’éducation, ou les deux. Les CEMEA ont repris le flambeau. Pour le mouvement d’éducation populaire, le film est en lui-même, un objet d’éducation. Ses cadres l’utilisent notamment pour des formations. Il constitue un objet commun autour duquel, après la projection, après avoir été transportés dans un monde souvent très éloigné de leur quotidien, les futurs animateurs peuvent partager, débattre… En Régions, le festival a ses prolongements, ses répliques, avec des projections de films qui, dans les circuits commerciaux de distribution, ne trouvent pas toujours leur place. Tous publics de tous âges sont alors invités à échanger, à confronter leurs subjectivités.

Mais tous les films ne sont-ils pas susceptibles d’être “films d’éducation”, toute création n’interroge-t-elle pas le monde et n’a-t-elle pas un rôle éducatif ? Tous les films peuvent-ils être considérés comme des oeuvres ? Comment distinguer ceux qui sont de purs produits commerciaux et ceux qui portent un regard ? Et que doivent faire éducateurs, enseignants, animateurs, formateurs, pour qu’un objet culturel joue son rôle ? Ce sont là questions aussi anciennes que la culture, donc que l’humain, dont le festival du film d’éducation vient renouveler les termes.”

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